Présenter ses difficultés lorsqu'on a un TSA, un exercice pour Juliette
- Malory Le Poittevin
- 12 févr. 2024
- 3 min de lecture
Cette illustration est issue de mon expérience actuelle au sein de mon entreprise individuelle, en tant qu’éducatrice spécialisée indépendante. Afin de préserver l’identité des personnes citées et dans un souci de confidentialité, les noms ou prénoms de celles-ci ont été modifiés.
Pour comprendre le contexte, je souhaite préciser que je propose deux formes d’accompagnement centrés sur les besoins de la personne :
Un accompagnement éducatif où le développement et/ou le maintien de capacités de la personne sont au centre du travail que l’on mène ensemble pour favoriser l’autonomie et/ou l’intégration de celle-ci.
Un autre accompagnement nommé « occupationnel » peut prendre la forme d’un relais éducatif par exemple. Il est centré sur des activités « plaisir ».
Aujourd’hui, je souhaite vous parler de Juliette à qui j’ai proposé un accompagnement éducatif…
Juliette est une jeune femme d’une vingtaine d’année. Il y a peu de temps, un diagnostic de trouble du spectre autistique (TSA) type asperger a été fait. Il peut être vécu comme un soulagement car il peut expliquer des difficultés que la personne ressent depuis très longtemps. Pour autant, cela n’est pas si simple. Les symptômes sont multiples et complexes.
Aujourd’hui, Juliette construit son projet de vie, non sans crainte pour le futur. Elle exprime des difficultés pour initier le contact avec des personnes qu’elle ne connaît pas. Dans ce contexte, elle a fait appel à mes services. Après divers entretiens éducatifs, nous avons déterminé ensemble des objectifs de travail. Entre autres, elle ressent le besoin de développer ses compétences psychosociales pour mettre toutes les chances de son côté afin de vivre sa vie sociale et professionnelle le plus sereinement possible.
Dans un premier temps, je lui ai proposé de faire un exercice autour des symptômes TSA et de la manière dont ils s’illustrent chez elle. Une façon pour Juliette d’identifier plus clairement ses troubles, et ensuite de pouvoir communiquer autour de cela. Avec son accord, je vous partage une partie de son travail :
« J’arrive à reconnaître les émotions simples comme la tristesse, la joie, etc.... J’arrive à converser avec les autres mais ça devient difficile de le faire normalement lorsqu’il y a du bruit autour, ou que je suis fatiguée par exemple. J’écoute encore mais j’ai tendance à faire des réponses courtes, à ne plus vraiment m’engager dans la conversation.
Je rencontre des difficultés avec le non verbal, et ne maintient le contact visuel avec les gens que parce que j’y pense et non pas pour transmettre quelque chose ou appuyer mes dires.
Le développement et le maintien des liens sociaux me posent également problème. J’ai beaucoup de mal à aller vers les autres et en général, si les autres ne viennent pas me chercher lorsque la relation est établie, je ne serai pas la personne à aller vers les autres en premier.
Il m’arrive parfois d’avoir des mouvements dits répétitifs, stéréotypés ou j’agite les mains, je me balance, je tourne, je prends des postures que les autres peuvent trouver inconfortable mais c’est principalement lorsque je suis anxieuse, fatiguée ou que je réfléchis. Il m’arrive aussi, assez souvent, d’aligner les objets.
J’ai quelques intolérances aux changements donc je prends toujours le même itinéraire. Et j’angoisse beaucoup si je dois changer de chemin.
J’ai également des intérêts restreints ou fixes sur lesquels je passe beaucoup de temps. J’ai des intérêts dits « communs » comme les animaux ou les manga, mais aussi d’autres qui le sont moins comme la médecine au XVe siècle.
J’ai des hypo- et hypersensibilités aux stimuli sensoriels.
Pour l’ouïe, c’est les deux à la fois, je peux ne pas supporter les bruits très aigus, par exemple celui de l’électricité, mais j’adore écouter de la musique très fort et en boucle.
Il en va de même pour le toucher, je ne supporte pas de toucher certaines matières ou textures comme certains velours, la nourriture humide ou les choses gluantes comme le slime. Mais j’aime beaucoup passer mes mains sur des surfaces rugueuses comme les graviers, les fermetures éclairs, les chaises avec du relief etc...
Pour l’odorat, c’est pareil, je suis vite dérangée par les odeurs trop fortes comme le parfum. Néanmoins, j’aime sentir les objets ( stylos, peinture... ) et les vêtements.
Et concernant la vue, c’est principalement de l’hypersensibilité à la lumière du soleil, même lorsqu’il y a des nuages, cela peut me gêner. »
Cette mise en mots à l’écrit est une première étape que Juliette a réalisé avec brio. Cela lui a permis de faire un pas de côté pour s’observer et repérer « son TSA » au quotidien.
Peut-être que cette illustration vous éclairera sur les difficultés qu’une personne comme Juliette peut vivre, ou simplement être l’extrait d’un accompagnement éducatif personnalisée.

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